Accord d’entreprise sur la BDESE : les représentants du personnel ne peuvent pas l’exiger !
Un syndicat peut-il réussir à faire suspendre la mise en place d’une BDESE faute de négociation préalable ? La Cour de cassation vient de répondre.
L’affaire en question
Dans cette affaire, le CSE a été informé d’un projet de cession en juin 2020. En septembre 2020 plusieurs membres du CSE et un syndicat ont demandé la suspension des opérations de cession en l’absence de consultation du CSE ou à tout le moins la suspension du projet de réorganisation interne.
Ils ont aussi tenté de faire suspendre la mise en place actuelle d’une base de données économiques et sociales (devenue BDESE) dépourvue de toute négociation préalable avec les organisations syndicales représentatives.
Leur volonté : que soit ordonnée, sous astreinte, la mise en place d’une négociation loyale avec les organisations syndicales représentatives sur l’organisation, l’architecture, le contenu et les modalités de fonctionnement d’une base de données économiques et sociales.
Les juges écartent toute obligation de négocier un accord sur la mise en place de la BDESE
La cour d’appel a retenu que l’employeur n’avait commis aucun manquement en s’abstenant d’engager des négociations avec les organisations syndicales.
Sans surprise, la Cour de cassation confirme.
La négociation d’un accord d’entreprise n’est en effet qu’une simple faculté et ne s’impose en aucun cas à l’employeur. Le Code du travail contient d’ailleurs de nombreuses règles qui fixent le contenu de la BDESE en l’absence d’accord.
Déjà sur les thématiques imposées, qui sont actuellement au nombre de 10, et le fait que le contenu précis diffère selon que l’entreprise compte au moins 300 salariés ou non.
Sur la périodicité aussi qui est de 6 ans (2 années précédentes, année en cours, 3 années à venir).
Les représentants du personnel ne pouvaient donc pas exiger la négociation d’un accord. Il est cependant bon de souligner que l’employeur a tout intérêt à peser les pour et les contres de la mise en place d’un accord d’entreprise sur la BDESE. En effet, cela présente de nombreux avantages et permet de réduire certaines contraintes. D’ailleurs, les entreprises en ont bien conscience : il y a aujourd’hui déjà plus de 2000 accords d’entreprise sur la BDESE et plus de 10 000 sur l’ancienne BDES.
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Rappelons qu’il doit s’agir d’un accord d’entreprise majoritaire ou, en l’absence de délégué syndical, un accord entre l’employeur et le CSE adopté à la majorité des membres titulaires. A défaut d’un tel accord, dans les entreprises de moins de 300 salariés, un accord de branche peut fixer le contenu de la BDESE.
Bon à savoir
Un point interpelle dans cette affaire bien que nous n’ayons pas tous les éléments de contexte : nous étions en 2020 et pourtant la mise en place de la base de données se faisait juste. On le sait, bien que l’obligation a démarré courant 2014, ou 2015 selon l’effectif, beaucoup d’entreprises sont très en retard. Et en plus du risque de délit d’entrave, les représentants du personnel auraient pu faire valoir que l’absence de BDESE doit conduire à la suspension de la procédure de cession. La position des juges sur ce point aurait été intéressante à connaître. En gardant en tête qu’une décision rendue par la Cour de cassation le 21 septembre 2022 a semblé exclure la possibilité de blocage hors cas des consultations récurrentes obligatoires du CSE (voir notre article sur BDESE online « Consultation sur les orientations stratégiques et sur les consultations ponctuelles : précision sur leur articulation »)
Cour de cassation, chambre sociale, 4 octobre 2023, n° 21-25.748 (le contenu de la base de données économiques et sociales étant, en l’absence d’accord, déterminé par les dispositions légales et réglementaires, la négociation préalable d’un accord ne présente pas de caractère obligatoire)