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Le droit de grève constitue un droit fondamental à valeur constitutionnelle. S’il est manifeste qu’au fil de la jurisprudence, un dôme protecteur s’est érigé autour de l’exercice de ce droit, ce dernier ne demeure pas pour autant absolu.

Droit de grève : un droit fondamental protégé

La grève est définie par la jurisprudence comme une cessation collective et concertée du travail en vue d’appuyer des revendications professionnelles (Cass, soc., 2 février 2006, n° 04-12.336).

Les salariés exerçant sans abus leur droit de grève, dans le strict cadre défini ci-dessus, bénéficient d’un régime protecteur. En effet, l’exercice du droit de grève, dans le cadre d’un mouvement licite :

  • ne peut justifier la rupture du contrat de travail, sauf faute lourde imputable au salarié, tout licenciement prononcé en absence de faute lourde étant nul de plein droit ;
  • ne peut donner lieu à aucune mesure discriminatoire notamment en matière de rémunérations et d’avantages sociaux.

Toutefois, les grévistes ne peuvent pas disposer des locaux professionnels comme bon leur semble.

Dès lors, si la grève implique généralement l’occupation des locaux professionnels ou la mise en œuvre de piquets de grève à l’entrée des locaux, de telles pratiques ne doivent pas porter atteinte à la liberté du travail des autres salariés non-grévistes, notamment en leur empêchant d’entrer dans l’entreprise.

Pour mettre fin à un tel mouvement, l’employeur peut être fondé à demander au juge des référés l’expulsion des grévistes.

Droit de grève : il ne peut porter atteinte aux libertés d’aller, de venir et d’entreprendre

En l’espèce, 40 salariés grévistes d’une entreprise ont bloqué à l’aide de chariots la sortie des caisses d’un magasin, ainsi que l’entrée principale de l’hypermarché de manière à en interdire l’accès aux clients. Tout en dissuadant ceux qui tentaient de forcer le passage, ces mêmes salariés ont placé des cagettes en bois devant l’entrée générale du magasin, faisant rebrousser chemin à la plupart des clients.

Suite à cela, le juge des référés, alors saisi par l’employeur :

  • a ordonné de mettre fin à ces blocages ;
  • et prononcé une interdiction, à ces salariés, et à toute personne prenant part au mouvement actuel ou agissant de concert avec eux, d’entraver par quelque moyen que ce soit, même partiellement, l’ensemble des accès du magasin sous astreinte.

Le syndicat initiateur du mouvement conteste en justice ces mesures, considérant qu’elles portaient atteinte à leur droit de grève.

Pour la Cour de cassation, en agissant de la sorte, le personnel gréviste avait, par ses actions de blocage, porté atteinte à la liberté d’aller et venir des clients, ainsi qu’à à la liberté du travail de leurs collègues et à la liberté d’entreprendre, le tout étant bien constitutif d’un trouble manifestement illicite auquel il devait être mis fin.

La Cour de cassation rappelle que les mesures d’interdiction prises doivent être proportionnées par rapport au but recherché, à savoir empêcher les débordements. Dès lors, elle confirme qu’il n’y avait pas lieu :

  • d’étendre celles-ci à toute personne prenant part au mouvement. Les mesures doivent concerner des personnes identifiées, ayant effectivement pris part aux actions de blocage ;
  • d’interdire à ces salariés de pénétrer dans le magasin bloqué ou sa galerie marchande, et de s’y maintenir dans des conditions étrangères à l’exercice de leur activité salariée au sein de l’entreprise.

Cour de cassation, chambre sociale, 10 juillet 2024, n° 22-24.499 (l’exercice du droit de grève trouve sa limite dans le respect des libertés d’aller, de venir et d’entreprendre)

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