Dispense de recherche de reclassement et de consultation du CSE en cas d’inaptitude : attention à ne pas vous tromper
Lorsque le médecin du travail déclare un salarié inapte, cela vous oblige en principe à chercher un reclassement et à consulter vos élus. A défaut cela peut rendre le licenciement sans cause réelle et sérieuse. Mais la consultation des élus n’est pas nécessaire en cas de dispense de recherche de reclassement. Encore faut-il qu’il y ait vraiment eu dispense comme l’illustre une affaire récente…
Consultation du CSE en cas d’inaptitude : quelles sont vos obligations ?
Lorsqu’un salarié a été déclaré inapte par le médecin du travail, l’employeur doit en principe engager une recherche de reclassement. Et avant de proposer au salarié le moindre poste de reclassement, il doit consulter les représentants du personnel.
Le CSE doit recevoir toutes les informations nécessaires sur l’état de santé du salarié (notamment les conclusions du médecin du travail) et la recherche de reclassement de façon à lui permettre de donner un avis en connaissance de cause. Cet avis n’est que consultatif.
La consultation a lieu :
- après le constat d’inaptitude du médecin du travail ;
- et avant la proposition de reclassement présentée au salarié inapte.
L’avis du CSE doit être recueilli que l’inaptitude soit d’origine professionnelle, c’est-à-dire consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle, ou non professionnelle. Même s’il n’a trouvé aucune solution de reclassement, l’employeur doit informer les élus du résultat de ses recherches.
L’absence de consultation des représentants du personnel, avant de proposer aux salariés des postes de reclassement, prive le licenciement pour inaptitude de cause réelle et sérieuse.
Exception à la consultation du CSE en cas de dispense de recherche de reclassement
On s’est longtemps demandé ce qu’il advenait de la consultation du CSE lorsque le médecin du travail dispense l’employeur de toute recherche de reclassement.
En effet, même lorsque l’employeur n’a trouvé aucun poste de reclassement, la consultation du CSE s’impose quand même. Alors fallait-il aussi maintenir la consultation en cas de dispense ? La Cour de cassation a répondu par la négative dans plusieurs affaires (Cass. soc., 16 novembre 2022, n° 21-17.255 et n° 21-21.050).
Mais encore faut-il être sûr qu’il y a bien dispense pour que toute consultation soit exclue.
Il existe deux exceptions à la recherche obligatoire d’un reclassement, en cas de mention expresse, dans l’avis du médecin du travail :
- que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ;
- ou que son état de santé fait obstacle à tout reclassement dans un emploi (Code du travail, art. L. 1226-2-1 et L. 1226-12).
Si une de ces deux mentions n’y figure pas, l’employeur ne peut pas considérer qu’il est dispensé de rechercher un reclassement. Mais parfois la situation est plus compliquée : il y a bien une mention mais elle n’est pas formulée comme il faut pour justifier une dispense…
Tel a été le cas dans une affaire récente où l’avis d’inaptitude du médecin du travail mentionne que « tout maintien du salarié dans un emploi dans cette entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé ». Les juges ont relevé en effet l’emploi des termes « tout maintien du salarié dans un emploi dans cette entreprise », au lieu des termes « tout maintien dans un emploi ».
Or ces termes n’impliquaient pas l’éloignement du salarié de toute situation de travail. Une recherche de reclassement aurait donc dû avoir lieu en dehors de l’entreprise. Notamment au sein du groupe s’il en existe un.
L’employeur n’était donc pas dispensé de procéder à des recherches de reclassement et de consulter les élus. Il a ainsi manqué à son obligation de reclassement.
Cour de cassation, chambre sociale, 13 septembre 2023, n° 22-12.970 (lorsque l’avis d’inaptitude du médecin du travail mentionne que tout maintien du salarié dans un emploi dans cette entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé et non pas que tout maintien dans un emploi serait gravement préjudiciable à santé, l’employeur n’est pas dispensé de son obligation de procéder à des recherches de reclassement)