Expertise demandée par le CSE : panorama des décisions récentes
La Cour de cassation a rendu plusieurs décisions intéressantes ces dernières semaines sur les expertises. Notamment sur les possibilités de contestation pour l’employeur. Zoom sur 5 décisions récentes.
Le droit à expertise
Dans les entreprises d’au moins 50 salariés, le comité social et économique peut décider de recourir à un expert-comptable dans le cadre des trois consultations récurrentes obligatoires qui portent sur :
- les orientations stratégiques de l’entreprise ;
- la situation économique et financière de l’entreprise ;
- la politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et de l’emploi.
D’autres situations permettent de recourir à l’expertise. L’une des plus courantes est lorsqu’un risque grave, identifié et actuel, révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel est constaté dans l’établissement.
Pour en savoir plus sur les possibilités de recours à l’expertise par le CSE vous pouvez trouver un document récapitulatif sur le site des Editions Tissot.
La Cour de cassation a apporté une double précision: un CSE d’établissement peut avoir recours à un expert lorsqu’il existe des mesures d’adaptation de la politique sociale de l’entreprise spécifiques à un établissement (Cass. soc.,16 février 2022, n° 20-20.373).
En revanche, lorsqu’un accord d’entreprise définit et réserve au CSE central les procédures d’information et de consultation récurrentes relatives à la politique sociale de l’entreprise, le CSE d’établissement ne peut pas désigner un expert (Cass. soc., 9 mars 2022, n° 20-19.974).
La contestation d’une expertise
L’employeur peut contester la nécessité de l’expertise, le choix de l’expert, le coût prévisionnel, l’étendue, la durée de l’expertise ou son coût final. Pour cela, il doit saisir le président du tribunal judiciaire dans un délai de 10 jours, qui court à compter de différents évènements selon la nature de la contestation.
Bon à savoir : en cas d’annulation définitive par le juge de la délibération du comité social et économique, les sommes perçues par l’expert sont remboursées par ce dernier à l’employeur. Le comité social et économique peut, à tout moment, décider de les prendre en charge.
Beaucoup d’actions en justice concernent l’expertise pour risque grave dont le coût est pris en charge en totalité par l’employeur.
2 choses à retenir dans l’actualité récente :
- l’employeur est légitime à contester une expertise pour risque grave qui repose sur l’épidémie de Covid-19 dès lors qu’il a pris les mesures de prévention nécessaires (rendu le port du masque obligatoire, pris des mesures de désinfection, de distanciation sociale conformes aux recommandations du Gouvernement). Le risque grave n’est en effet alors pas avéré (Cass. soc., 21 avril 2022, n° 20-21.318) ;
- si l’employeur conteste la délibération du CSE décidant le recours à l’expertise, c’est au CSE de démontrer l’existence d’un risque grave, identifié et actuel, dans l’établissement (Cass. soc., 18 mai 2022, n° 20-23.556).
L’étendue de la mission de l’expert
L’expert dispose d’un droit de communication des documents et éléments d’ordre économique, financier, social ou environnemental nécessaires à l’accomplissement de sa mission.
L’employeur doit fournir à l’expert du CSE les informations nécessaires à l’exercice de sa mission.
Les juges ont apporté deux précisions importantes :
– il appartient à l’expert de déterminer les documents utiles à sa mission. Par exemple les DADS et DSN se rapportant à l’évolution de l’emploi, aux qualifications et à la rémunération des salariés au sein de l’entreprise, il s’agit bien de documents nécessaires à l’exercice de la mission d’expertise dans le cadre de la consultation sur la politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et l’emploi (Cass. soc., 23 mars 2022, n° 20-17.186)
– peu importe que les informations demandées ne soient pas au nombre de celles devant figurer dans la BDESE en application du Code du travail (Cass. soc., 18 mai 2022, n° 20-21.444).