Manquement à l’obligation de discrétion : un élu peut être sanctionné
L’employeur ou ses représentants sont parfois amenés à faire figurer dans la BDESE des informations qui ont un caractère confidentiel. Les élus sont alors tenus à une obligation de discrétion. Ils peuvent être sanctionnés s’ils ne la respectent pas comme l’illustre une décision récente.
Informations confidentielles et obligation de discrétion
Toutes les informations données aux élus, via notamment la BDESE, ne peuvent pas être classées comme confidentielles. La confidentialité suppose en effet que :
- la divulgation de l’information puisse nuire à l’intérêt de l’entreprise ;
- et que l’information ne soit connue ni du grand public, ni des salariés.
Ainsi, une information qui a été divulguée antérieurement n’est pas considérée comme confidentielle.
Pour chaque information que vous jugez confidentielle vous devez l’indiquer à vos élus, en précisant la durée de la confidentialité. Vous devrez aussi pouvoir justifier par des éléments objectifs, le caractère confidentiel des informations.
Par exemple, avec la solution BDESE online, lorsque vous allez saisir une donnée ou insérer un fichier, une fenêtre va s’ouvrir et va notamment vous demander s’il s’agit d’une information confidentielle ; le cas échéant vous n’aurez qu’à répondre oui et cocher l’une des durées de confidentialité proposées pour que cela apparaisse à vos représentants du personnel. Nous vous proposons aussi une charte de confidentialité que vous pouvez faire signer aux utilisateurs de BDESE online.
Certaines informations sont aussi confidentielles par nature comme les informations relatives à la situation de l’actif réalisable et disponible, et du passif exigible, le compte de résultat prévisionnel, ou le bilan annuel.
Face à une information confidentielle par nature ou une information à caractère confidentielle présentée comme telle par l’employeur, les membres du CSE sont tenus à une obligation de discrétion.
Cette obligation de discrétion interdit aux élus de divulguer aux salariés de l’entreprise ou aux personnes ne faisant pas partie de l’entreprise, les informations présentées comme étant confidentielles.
Bon à savoir : D’autres obligations existent. Ainsi, face à un secret de fabrication dont ils ont connaissance, les membres du CSE doivent respecter une obligation de secret professionnel. L’article L. 151-9 du Code du commerce prévoit aussi l’obligation pour les membres du CSE de respecter le secret des affaires lorsqu’ils sont informés d’un tel secret par l’employeur dans le cadre des réunions de l’instance.
Sanction disciplinaire possible en cas de manquement à l’obligation de discrétion
Si un élu ne respecte pas son obligation de discrétion une sanction disciplinaire est envisageable telle qu’un blâme, un avertissement ou une mise à pied disciplinaire.
C’est ce qu’a rappelé la Cour de cassation dans une affaire récente. En l’espèce une salariée membre du comité d’entreprise européen a été sanctionnée d’un avertissement pour non-respect réitéré des règles de sécurité et de confidentialité. Cette salariée avait imprimé des informations relatives notamment à la situation financière d’une agence du groupe. Ces informations concernent la gestion interne de l’entreprise ainsi que ses projets de développement. L’impression s’était faite sur une imprimante d’hôtel plutôt que sur un ordinateur de l’employeur permettant une impression sécurisée à distance.
La salariée demandait l’annulation de la sanction estimant qu’elle n’avait pas commis d’abus dans son mandat. Elle faisait aussi valoir que l’employeur n’établissait pas la nature confidentielle de l’information au regard des intérêts légitimes de l’entreprise.
La Cour de cassation se range du côté de l’employeur. Elle confirme qu’en cas de contestation c’est à l’employeur d’établir le caractère confidentiel des informations au regard des intérêts légitimes de l’entreprise. Or en l’espèce les juges ont relevé que selon le procès-verbal de la réunion du comité à laquelle la salariée a participé, le sujet « est encore sous embargo » et « les informations doivent donc rester strictement confidentielles ». Ils ont fait ressortir :
– d’une part que le document litigieux avait été imprimé en méconnaissance des règles de confidentialité et de sécurité informatique destinées à assurer, vis à vis des tiers non autorisés, la sécurité des informations ;
– d’autre part que certaines des informations figurant sur ce document revêtaient, en raison de leur nature et de leur contenu, un caractère confidentiel au regard des intérêts légitimes de l’entreprise, et que ces informations avaient été préalablement présentées comme telles par l’employeur.
Le manquement à l’obligation de discrétion pouvait donc bien être sanctionné.
Cour de cassation, chambre sociale, 15 juin 2022, n° 21-10.366 (revêtent un caractère confidentiel les informations qui sont de nature confidentielle au regard des intérêts légitimes de l’entreprise, ce qu’il appartient à l’employeur, en cas de contestation, d’établir)